Pour que les voix puissent résonner. Il ne leur faut pas plus qu’un lieu, une esplanade ou un escalier, et un public sur lequel rebondit l’écho. Le nouveau concept de l’Unesco est sans pareil. Branche descendante de l’initiative Li Beirut, TERDAD s’inscrit avant tout dans un projet de reconstruction du pays suite à la double explosion cataclysmique du 4 août. Une « nouvelle approche » là où il n’est plus possible de faire marche-arrière. Un projet de soutien aux échafaudages. Des écoles, du patrimoine architectural, de la vie. Avec près de 100 écoles réhabilitées et 14 bâtiments stabilisés, l’unesco entend aussi relever ce que l’héritage a de plus précieux : sa population. « TERDAD n’est pas seulement un festival, ou un rendez-vous urbain qui pourrait s’approprier un caractère annuel, c’est une idée pour le Liban, que l’Unesco aimerait ne pas laisser tomber » affirme Leila Rezk, consultante de l’ONG pour la culture. Le concept, qui étend son nimbe d’organisations en organisations ne s’éteindra d’ailleurs pas au crépuscule de ces journées, mais s’inscrira petit à petit dans l’Agenda de l’Unesco, qui lui octroie dès lors une liste de projets d’aujourd’hui à décembre.
Rencontre entre les arts
Pendant trois jours l’idée battra son plein. D’un pas de danse, d’une voix enivrante ou encore dans la magie d’une improvisation, les acteurs artistiques et culturels, fervents porte-paroles des révolutions, établiront leur bilan post-destruction. Que s’est-il passé ? Où en sommes-nous ? Et surtout, que reste-t-il à faire ? Autant de questions qui semblent vouloir venir puiser leurs réponses dans le regard du public. Pourtant, les artistes ne s’en sont posés aucune. Leurs œuvres ne sont que bruits du corps et de l’esprit. Et si accents politiques et thématiques existentielles cohabitent harmonieusement dans le programme du festival, c’est pourtant une liberté totale de s’exprimer qui fut imposée pour cette première alternative et expérimentale de l’Unesco, totalement gratuite.
« Au Liban, les artistes ont envie de venir à vous » - Costanza Farina
« Les sentiments confus et négatifs sont présents en tous. Il est surtout fréquent de se découvrir porteur de tristesse, de frustration, ou de colère. Mais c’est un message d’espoir que nous voulons diffuser » rappelle Costanza Farina, directrice du bureau régional de l’UNESCO à Beyrouth. « Nous voulons rappeler à ces professionnels et amateurs qu’il est possible de se réengager sur la scène culturelle, nous voulons investir dans le talent libanais, et dans la jeunesse, afin que ceux qui le veulent puisse rester et profiter à tous. Car nombreux sont les pays dans lesquels j’ai travaillé, mais le Liban est le premier endroit où je n’ai pas eu à happer de mon propre chef les acteurs culturels. Ici, ils ont envie de venir à vous ».
Faire son deuil pour repartir
Le défi est laborieux, mais symbolique et poétique. C’est un parcours sur quatre étapes, une balade euristique pour guérir le peuple libanais de ses écorches. De Sursock à Karantina, en passant par Mar Mikhael et Gemmayzé, le ramener sur ces estrades qui comme lui, ont tremblé, et l’inviter à apprécier le travail du temps et de la persévérance pour s’en imprégner ; une facette essentielle du projet selon Leila Rezk, qui entend aussi s’adresser aux publics de ces régions, particulièrement affectés par les retombées du mois d’août. « Co-produire avec les 5 organisations que nous avons minutieusement choisies, organiser les choses et les mener à bien dans ces quartiers, c’est aussi une façon pour nous de modifier leur image dans les imaginaires des populations qui y vivent. C’est se saisir du vide pour leur inculquer que la vie reprend malgré les ruines. Qu’elle reprend au-delà des ruines. »
Dans cette course contre la montre où le pays des cèdres bat chaque jour son propre record, c’est un rôle global auquel l’Unesco prétend. Pour sauver l’écosystème de l’industrie culturelle, et toutes les entités qui y vivent en symbiose, il faut aussi préserver ses emplois, si ce n’est en recréer. Au Liban et depuis 2018, le nombre d’entreprises de l’économie créative est passé de 6200 à 2000 environ, alors que le secteur de la culture est celui qui apporte le plus de richesses au Liban, représentant près de 5% du PIB et 20% des emplois du pays. TERDAD, plus que d’offrir des opportunités, aura donc notamment permis de recruter des dizaines de personnes pour mener à terme ces quatre mois de travail intense et collectif entre les différentes ONGs.
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