Dix églises et sept mosquées témoignent de la ferveur des habitants de ce vieux Beyrouth qui interpellent Dieu dans chacune de leurs interjections.
La cathédrale Saint-Georges des orthodoxes, kanissat el roum, superbement rénovée et dotée d’une iconostase magnifiquement sculptée, était une des plus belles églises de la région. L’archevêché comprenait un couvent, une tour carrée de trois étages abritant des religieux, un jardin et un cimetière. Point de rassemblement de la communauté orthodoxe, il était doté d’une imprimerie, d’un dispensaire et d’un centre administratif. Au cours des travaux de restauration entrepris après la guerre, des fouilles permirent de découvrir trois autels superposés et des colonnes qui attestent de la présence d’une basilique sous l’actuelle église. Peut-être la fameuse basilique Anastasie dont parlent les historiens lorsqu’ils évoquent l’école de Droit de Beryte.
En 1884, Monseigneur Debs décida d’édifier une cathédrale maronite inspirée de la cathédrale Sainte Marie Majeure de Rome. La cathédrale Saint-Georges des maronites fut commencée en 1884, achevée dix ans plus tard et inaugurée le jour des Rameaux. Sous le presbytère, un monde étrange se côtoyait. En effet, des souks occupaient les galeries et étaient connus sous le nom de souk Abou Nasr et souk el Mlabbass car on y vendait des bonbons. Près de l’église, « l’escalier des quarante hommes » encadre cinq colonnes romaines qui faisaient partie d’un lieu de culte romain construit en mémoire des quarante soldats romains chrétiens exécutés par Lucius, beau-frère de l’empereur Constantin.
La première pierre de la cathédrale Saint-Louis des Latins est posée en août 1864 et, quatre ans plus tard, le 2 août, l’église fut consacrée. Un couvent était situé près de l’église cabbouchié et abritait les prêtres et les services administratifs. Durant le mandat français, la cathédrale connut ses heures de gloire car toute la communauté française y célébrait mariages, messes de requiem et anniversaires du 11 novembre.
La mosquée de l’émir Mounzer située à l’angle des rues Riad el Solh et Abdel Hamid Karamé est aussi connue sous le nom de Nawfara, la mosquée au jet d’eau. Elle a été édifiée en 1620 par l’émir Mounzer sur une structure antique dont il subsiste huit colonnes romaines.
On appelle aussi la mosquée de l’émir Mansour Assaf mosquée Bab es Saraya, en référence au Petit Sérail qui se trouvait à proximité. L’émir Assaf qui gouverna Beyrouth de 1523 à 1580 fréquentait ce lieu de culte situé près de la mosquée al Omari et édifié en 1572 sur les ruines d’une église de l’ordre des Franciscains. Cette mosquée était l’une des plus belles, ses deux portes monumentales ornent aujourd’hui la mosquée al Mounzer et celle de Aїn el Mreissé.
La mosquée al Omari, en hommage au calife Omar, compagnon du Prophète, est également connue sous le nom de mosquée du Vendredi. C’est l’une des mosquées les plus anciennes de Beyrouth. Son sous-sol recèle d’importants et surprenants vestiges. Des thermes romains furent enfouis sous une église byzantine ensevelie à son tour sous les fondations d’une cathédrale édifiée par les Croisés en 1150 : la cathédrale Saint-Jean-Baptiste des Chevaliers de l’Hôpital, un des uniques vestiges de cette époque. Elle fut utilisée comme mosquée par Saladin lors de la prise de la ville en 1187. Érigée rue Weygand en 1291, la mosquée fut dotée d’un minaret.
La mosquée al Majidiyé ou mosquée Assour se situe près du khan Antoun Bey. Elle fut édifiée en 1841 sur les ruines d’un ancien fort croisé durant le règne du sultan Abdul Majid, d’où son nom.
Inaugurée en octobre 2006, la mosquée al Amine, d’une superficie de 10 000 mètres carrés, s’inspire de la mosquée bleue d’Istanbul. Sa construction était déjà prévue dès les années 50 mais ce n’est qu’en octobre 2003 que les travaux débuteront. Quatre minarets et des coupoles recouvertes de céramique bleue donnent sur la tombe de Rafic Hariri.
Nul doute que Beyrouth occupa dans les premiers siècles après Jésus-Christ une place à part dans le domaine culturel. La célèbre école de droit dont l’excellence de l’enseignement se raconte encore aujourd’hui, voyait venir à elle des étudiants de toute la région. La qualité exponentielle de l’enseignement des professeurs de cette institution contribuèrent à faire de Beryte « la mère des lois ». Ulpien, Démosthène, Anatole et Justinien qui fut à l’origine du fameux code, exaltèrent entre autres leur savoir dans cette petite ville de Méditerranée qui acquit une réputation à nulle autre pareille, et dont l’école surpassa celles de Constantinople et de Rome. Mais le 16 juillet 551, la terre trembla et un raz de marée d’une ampleur effroyable rasa et la ville et son école de droit. Présente encore dans les écrits et les esprits des historiens, les vestiges de cette institution se cachent dans le sous-sol de Beyrouth, quelque part à proximité de la cathédrale Saint-Georges.
Maintes fois fouillé durant l’histoire, le quartier et ses alentours n’en finit pas de révéler toute la richesse de son sous-sol. Dès la fin de la guerre, plus de 87 chantiers archéologiques ont été ouverts et 500 archéologues, chefs de mission, étudiants et stagiaires ont participé aux travaux. Les fortifications de la cité datant du IIe millénaire av. J.-C. ont entre autres été exhumées ainsi qu’un glacis protégeant la Beyrouth phénicienne, un quartier d’habitations de l’époque perse et un autre de l’époque hellénistique, de nombreux monuments d’époque romaine : forum, thermes, nécropoles, sans oublier des zones artisanales avec des ateliers de potiers et un atelier de verrier de l’époque omeyyade. Une équipe de l’Université libanaise a dégagé une partie du Cardo Maximus, près de l’église Saint-Georges des orthodoxes. Cette voie romaine qui parcourait Beyrouth était agrémentée de part et d’autre de colonnes de granit qui attendent aujourd’hui de faire partie du Jardin du Pardon, promenade au cœur des vestiges, qui aurait dû être inauguré en juillet 2005.
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