Cet ouvrage vise à tracer l’évolution de l’usage de la ferronnerie architecturale dans l’architecture du XXe siècle de la ville de Beyrouth. Tout en se focalisant sur ses origines stylistiques et ses sources d’influence, la production d’ouvrages en fer forgé est analysée à travers des centaines de relevés et de documents d’archives repérés au Liban et France.
Largement diffusées dans des catalogues commerciaux spécialisés, les œuvres de ferronnerie architecturale modernes répandues en Europe deviennent une référence incontournable pour les architectes et artisans de plusieurs pays du bassin méditerranéen. Les modèles d’artistes décorateurs et maîtres-ferronniers d’art exerçant à Paris entre les deux guerres (comme Raymond Subes, Gilbert Poillerat, Jean Desnos et d’autres) se trouvent être les inspirateurs de nombreux dessins de fenêtres, de mains courantes d’escaliers et surtout de garde-corps métalliques de la capitale libanaise, de la période mandataire et post- mandataire. Adoptés, transformés et enrichis, certains dessins qui ceinturent des milliers de balcons à Beyrouth reflètent éloquemment cette inspiration. N’occupant qu’une place marginale dans l’histoire de l’architecture, la ferronnerie est remise au centre de cette recherche comme symbole des interactions et des transferts artistiques durant une grande Éditions Geuthner ~ 2 ~ partie du XXe siècle.
Ce projet, débuté à Beyrouth avec un long travail sur le terrain, comprend un inventaire systématique dans 52 secteurs et le relevé géométrique de plus de 1500 motifs de portes, garde-corps, fenêtres et rampes d’escalier. À partir de ce travail de terrain inédit, l’ouvrage propose une investigation sur les paradigmes esthétiques ayant joué un rôle déterminant dans la ferronnerie ornementale de l’architecture moderne au Liban. Initié il y a plusieurs années, ce projet doit principalement son existence à un besoin pressant de diriger les regards vers un patrimoine architectural en péril dans l'absence alarmante de toute application des lois de protection et de sauvegarde. À l’heure actuelle, l’ensemble du territoire libanais demeure ouvert à la spéculation foncière : La démolition d’un fleuron de l’architecture moderniste, même celle d’une maison du XIXe siècle, ne semble susciter qu’une indignation temporaire et restreinte sans déclencher pour autant un véritable intérêt du grand public et encore moins celui des organismes officiels concernés. En proposant la ferronnerie comme une nouvelle clé de lecture de cet habitat urbain digne d’être conservé et transmis aux générations futures. C’est donc à travers un élément a priori anodin mais sans doute caractérisant, et voire même emblématique de l’histoire des échanges entre cultures, que nous relançons la découverte du projet d’architecture moderne : la ferronnerie sera analysée comme le symptôme d’une mondialisation esthétique qui se met en œuvre dès le début du XXe siècle. Le contenu, basé sur une enquête exhaustive, constitue le premier travail de recherche sur l’architecture moderne de la Beyrouth mené à l’échelle de toute la ville. Mis à part les 1500 relevés provenant d’environ 600 bâtiments localisés, l’ouvrage présente des photographies d’archives inédites d’un contexte urbain radicalement transformé par la longue guerre (1975- 1990), par les projets de reconstruction (1990-2000) mais aussi et surtout par la dernière explosion du 4 août 2020.
Ce projet expose également des extraits photographiques des catalogues publiés en France entre 1924 et 1958 sources d’inspiration et de transformation de nombreuses réalisations au Liban.
Le livre se compose de 504 pages.
Mazen Haïdar est architecte du patrimoine et chercheur diplômé à l’Université de Rome « Sapienza ». Il est titulaire d’un doctorat en architecture de l’Université Paris 1 PanthéonSorbonne avec comme sujet la réception et les pratiques d’appropriation de l’immeuble résidentiel moderne à Beyrouth entre 1946 et 1990. En tant que praticien, il a dirigé et participé à plusieurs projets de restauration au Liban. Après avoir enseigné à l’American University of Beirut (AUB) et la Lebanese American University (LAU), il a occupé entre 2013 et 2017 le poste de Directeur Adjoint de l’École d'Architecture de l’Académie Libanaise des Beaux-Arts (ALBA) - Université de Balamand. Ses articles en langues arabe, anglaise, française et italienne portent sur le patrimoine architectural et la notion de mémoire dans la restauration du bâti résidentiel. Parmi ses ouvrages: Città e memoria, Beirut, Berlino, Sarajevo (Milan : Bruno Mondadori, 2006). En 2017, il obtient une résidence d’artiste à la Cité Internationale des Arts à Paris par le biais de l’Institut Français pour son projet de recherche La Ferronnerie architecturale du XXe siècle à Beyrouth.
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