Parce que vous pensiez sincèrement que notre Révolution allait passer sans heurt ?
Sans que toutes les tentatives de récupération ne soient mises à l’épreuve ? Accusations d’allégeances étrangères, contre-manifestations, émeutes, tirs sur la foule, vandalisme, saccage des emblèmes, jusqu’au recours à la meute lâchée, bâtons et armes blanches pour effrayer ceux qui n’ont que leur corps pour se défendre.
Mais bien sûr qu’ils vont tout essayer : insulter les journalistes, se défouler sur les réseaux sociaux, brandir le spectre de la guerre civile, de la famine, de la faillite du pays… Pourquoi pensez-vous qu’ils vont nous épargner ? Parce que nous chantons et nous dansons sur les places en guise de protestation ?
En fait, plus j’écoute, plus je me rends compte que tout le monde n’a pas compris la noblesse de cette Révolution qui se résume à quelques mots que des années de débandade ont dépouillé de leur sens : PENSEE LIBRE, LAÏCITÉ, UNITÉ.
Pensée libre, c’est-à-dire dépouillée de toute allégeance autre qu’à sa propre réflexion, son propre jugement. Sans référence ni au clan, ni à la tribu, ni à la religion, ni à la région, ni au parti, ni au zaïm, et le plus important libérée du clientélisme. Ce clientélisme qui s’est installée pour pallier l’absence de l’Etat.Rappelons-nous que quand on a un enfant malade et qu’on n’a pas d’Etat qui assure son hospitalisation, on a recours à toute personne qui offre une aide… ou une promesse, gage suprême pour vassaliser tout requérant ainsi affaibli…
Pensez-vous que ceux qui ont pour mode de vie la tromperie, la langue de bois, la corruption, les faux-semblants, l’opacité des relations, le « louche » des fortunes, l’incongruité des réussites… Pensez-vous que ces gens-là évaluent à sa juste valeur la quintessence de ce soulèvement populaire ? Pour eux nous sommes des yogis en mal de tapis pour s’exhiber, nous sommes des festivaliers qui aimons entendre la musique à tue-tête, nous sommes des oisifs qui nous promenons en regardant les jolies femmes, des fêtards qui cognent sur des casseroles pour faire du bruit
…
Quoi faire alors ? Lutter. Rester debout : unis, libre dans notre prise de position et toujours dans cette superbe unicité des foules réunies. Lutter contre tous ceux qui n’ont pas intérêt à ce que cette Révolution aboutisse pleinement. Pensez au gars qui a besoin d’être soudoyé pour sortir votre dossier du tiroir, à celui qui occupe un poste parce que c’est le poulain de Père un tel ou Sheikh un tel, à celle qui prend sa « commission » durant l’exercice de ses fonctions, à la garde rapprochée de tel politicien ou tel notable, quel que soit son degré dans la hiérarchie du pouvoir… Ils sont très, très nombreux.
Quoi faire ? Ne pas se laisser intimider. Juste ignorer les remous et rester soudés.
Notre cause est juste. Notre pensée nous la dicte. Notre allégeance à cette terre « promise » que nous chérissons nous l’impose.
Et toujours se dire et se redire : Si la Révolution devait s’arrêter, quelle serait l’alternative ?
Photo : @ @betty_khatchikian
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