Un roman d’amour. Un roman d’été. Parce que ça fait du bien, ça fait rêver, on s’y reconnaît, on comprend quelque chose qui nous avait échappé… Rien de mieux qu’une histoire d’amour pour nous aider à nous évader du quotidien éprouvant. Que serait-ce quand ce sont deux histoires d’amour que vit simultanément le protagoniste ? Pas d’imbroglio, mais deux passions intenses, parallèles, aussi vraies l’une que l’autre qui assaillent le narrateur. Un jeune homme fraîchement débarqué dans la grande ville, déplumé par un revers de fortune et qui doit s’adapter au monde qui l’entoure. Très vite, il rencontre une femme plus âgée que lui, séduisante à souhait, voluptueuse mais secrète. Madame Hayat ensorcelle pratiquement le jeunot et lui procure des sensations et des sentiments inusités pour lui. Il s’y attache fortement. Au même moment, il tombe amoureux d’une jeune et belle étudiante en littérature qu’il fréquente sur les bancs de la faculté. Avec elle il partage les élans de jeunesse, le goût des mots et des écrivains, ainsi que des rêves d’avenir.
Un scénario qui semblerait banal si ce n’était la plume de ce journaliste renommé de Turquie dont l’œuvre, couronnée de succès, a été traduite en plusieurs langues.
À la force des émotions et états d’âme de l’ingénu fraîchement initié, décrits copieusement, vient se greffer une situation politique qui se détériore autour de notre héros. Sans jamais expliciter l’origine exacte de l’étau qui se referme sur lui et tous ses amis, l’auteur nous enfonce avec lui dans une lente descente vers l’insécurité ambiante. Les libertés occultées, la fuite en avant des jeunes, le silence épeuré de ceux qui restent, le marasme qui l’entoure n’altère pas les sentiments du jeune Fezil, de plus en plus déboussolé quant à son avenir, mais aux prises d’un monde gouverné par l’extrémisme.
Quand on sait qu’Ahmet Atlan a été emprisonné plus de quatre ans à Istamboul et que ce roman a été écrit en prison, on comprend mieux le sens du mot « évasion ». Ce que procure ce titre, édité dans la collection « Lettres turques » et traduit en français par Julien Lapeyre de Cabanes.
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