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Lecture 43 : Angélique, Guillaume Musso, Calmann Lévy, 2022

22/02/2023|Gisèle Kayata Eid

Il y a un mois environ, j’avais été choquée par le titre d’un article du Figaro magazine : « Marc Levy contre Guillaume Musso : qui est le plus nul ? »  S’il est vrai que les critiques littéraires ont toujours dédaigné la culture populaire, j’étais néanmoins curieuse de lire le dernier roman « Angélique » de l’auteur le plus lu en France depuis 12 ans consécutifs, le seul écrivain à avoir écoulé plus d’un million d’ouvrages en 2022 avec exactement 1.383 millions de livres vendus...

Guillaume Musso ne m’a pas déçue, bien au contraire. Je retrouvais même l’auteur que j’avais interviewé en 2008 lors du Salon du livre de Beyrouth. Le titre de mon article (qui date donc de 15 ans) aurait pu être rédigé aujourd’hui : « Guillaume Musso : un auteur chaleureux derrière des best-sellers policiers ». Sa recette pour le succès semblait être déjà en marche comme le montrent ces quelques extraits :   

 

Guillaume était là. Assis en bras de chemise, souriant. Il se lève pour saluer chacune des journalistes invitées à une rencontre-atelier. Il répond gentiment aux questions qu’on lui adresse. Il a la parole facile et le verbe coulant.  Aussi prolifique que dans ses livres, généreux de ses idées, de sa personne et de ses projets, le jeune Musso apparaît comme un des héros de ses livres...  A le voir si simple, si amical, on a de la peine à imaginer que ce jeune homme de 34 ans aux cheveux bouclés est le deuxième plus gros vendeur en France.  En quelques années, plus de 4 millions de livres ont été traduits dans une trentaine de pays. Les causes de son succès ?... Un cocktail de prédispositions que le jeune Musso travaille d’arrache-pied à faire fructifier. C’est la phase « douloureuse » qui l’enferme des mois, à raison de 17h par jour à fignoler, à épurer, à alléger encore et encore.
 

Cinq romans qui ont pris des années de travail à l’ex-professeur d’économie qui a découvert son talent d’écrivain en classe de seconde, à la suite d’un concours de nouvelles, lancé par son instituteur.  Après un malheureux manuscrit, les éditions XO publient ce qui va être le premier succès mondial de Musso : Et après ?  (porté à l’écran). Et après, et depuis, les titres accrocheurs se succèdent : Sauve moi, Seras-tu là ?, Parce que je t’aime et Je reviens te chercher qu’il est venu signer au Salon de Beyrouth...

 

L’écrivain construit la trame de ses romans en se racontant tout sur ses héros : la couleur de leurs cheveux, le nom de leur grand-mère, leur plat préféré… « cela m’aide à moi, pour capter des détails d’atmosphère ». Une relation intimiste que ce fils de mangas, BD, vidéos, et télé américaine transmet à ses lecteurs qui, d’emblée sont pris dans une « écriture en colimaçon … une des conditions du suspense, qui donne envie de continuer la lecture. » Enthousiaste, celui dont les livres ont nourri la pensée, et le cinéma la forme, explique comment il procède pour ficeler son roman policier, monter des mini-biographies sur ses héros, opérer un travail de repérage journalistique fouillé, se documenter profondément sans craindre de référencier ses citations… Résultat : des romans agréables à lire, fluides, imagés, contemporains, impeccablement construits, imaginatifs à souhait…

Mais il y a surtout ce côté diablement humain et simple de Musso qui séduit et accroche. Ses romans dont les idées cogitent en lui depuis des années, parlent de deuil, de mort, de vieillesse autant de sujets graves qu’il aborde avec légèreté.  « Je ne suis pas un auteur du moi, mais je mets ma sensibilité dans mes personnages.  Je parle de mes émois, de mes émotions, mais en décalage. J’ai horreur des écrivains qui profitent de leurs livres pour faire des rendements de compte. Les gens m’inspirent, mais avec sublimation. Je déteste toute la littérature du bien-être qui donne des recettes. Dans mes livres, je soulève beaucoup de questions, mais je ne livre pas de messages ou des conseils ».
 

Et c’est probablement pour toutes ces raisons qu’« Angélique » est si plaisant à lire. On tourbillonne avec Musso à la recherche du pourquoi, à travers ses pages on « visionne » un film avec des lettres et des phrases, on s’émoie au suspense extrême, aux rebondissements rocambolesques... De quoi ne pas se prendre la tête, déjà assommée par les soucis et inquiétudes de toutes sortes, et se laisser couler au gré de 300 pages divertissantes... et, cerise sur le gâteau, qui se terminent sur une scène qui se déroule à Beyrouth !

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