Les amants de Casablanca, Tahar Ben Jelloun, Gallimard, 2023
Un roman que j’attendais de lire, mais qui m’a laissée sur ma faim.
Bien-sûr il y a là une critique à peine voilée de l’actuelle ville de Casablanca qui se veut branchée, alors qu’elle demeure enfoncée dans le plus pur traditionalisme. Les personnages, qui se veulent modernes et tout à la fois conservateurs sont certes attachants, tant la brillante pharmacienne femme de carrière accomplie, fougueusement infidèle, que le mari cocu, brave médecin craintif, transi d’amour malgré l’affront. On y apprend aussi beaucoup sur les dynamiques de la bourgeoisie marocaine…
Pourtant, sans vouloir choquer les critiques littéraires, voire les jurés des prix littéraires les plus prestigieux ou la presse admiratrice du dernier opus du candidat au prix Nobel de littérature, l’histoire d’amour de ce couple marié, de son désamour et de son rabibochage de fin de roman résiste à nous embarquer. Le prolifique écrivain dont les œuvres se comptent par dizaines, toutes publiées par des maisons d’édition célèbres, nous avait introduit dans son monde franco-marocain, avec un talent indiscutable qui lui donnait une longueur d’avance à l’abord de tout nouvel ouvrage qu’il publiait. Or ce roman qui ne se veut pas à l’eau de rose peine à nous accrocher.
Est-ce le découpage des parties qui remontent le temps pour mieux expliquer l’évolution des sentiments de ses héros mais qui pourtant ne semblent pas coller à leur réalité ? Seraient-ce les digressions un peu trop nombreuses sur l’islam, ses dérives et ses contradictions, comme autant de mises au point subtilement glissées ? Ou les références culturelles personnelles de l’auteur quelque peu parachutées qui alourdissent la lecture ? À moins que ce ne soient les descriptions techniques des ébats amoureux qui manquent de pouvoir de suggestion érotique ? Ou tout simplement la longueur du récit, qui piétine par moments, noyant ce drame conjugal typique des années 2020.
Quoiqu’il en soit, Nabile et Lamia, prototypes des couples actuels dans un pays conservateur, sous la plume de Tahar Ben Jelloun, auraient dû nous « arracher le cœur »… On ne fait que les observer.
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