”When it's that GOOD it's GOODIES ” ! L’ÉPICERIE FINE À BEYROUTH ET FERNEY VOLTAIRE
C’est à Ferney Voltaire dans les années 80, à la lisière de Genève que j’avais fait pour la première fois connaissance avec ce slogan devenu synonyme du meilleur. Un temple dédié à la gastronomie levantine y avait jeté l’ancre et y était devenu un véritable port d’attache pour tous les moyens-orientaux et les exilés de la guerre libanaise en particulier.
L’enseigne offrait en plein Occident le meilleur des saveurs de l’Orient.
Plus tard, au milieu des années 90, je découvris celui de Verdun à Beyrouth où j’allais une fois par semaine cultiver la nostalgie heureuse au rayon fruits secs et épices et puiser l’inspiration avec Abou Moustapha au rayon boucherie. Son babillage en français glané dans sa jeunesse d’apprenti du côté de ”souk el franj ” et son sourire enjôleur résonnent encore jusqu’aujourd’hui dans mes souvenirs.
” Goodies ”est ma première destination chaque fois que j’atterris dans la capitale libanaise parce qu’entre les pyramides de légumes et les paniers de fruits secs, les Ahlan wa Sahlan et les sourires, j’y retrouve encore le charme du Beyrouth de mon enfance. Quant aux épices de première qualité, elles m’accompagnent aujourd’hui partout dans le monde. Elles n’ont pas leur pareil pour reproduire les saveurs d’un Shawarma bien dosé ou pour donner de l’esprit à une Moghrabieh par un dimanche gris à Paris.
Toujours synonyme de fête, Goodies fait depuis des années partie de notre quotidien et de toutes nos célébrations familiales.
Retrouver Nour Halwani, devenue aujourd’hui le phare discret des lieux, talent sûr du Goodies de demain est à chaque fois, un vrai bonheur. Dans le soleil de son sourire, je retrouve la chaleur, la courtoisie et le sens de l’accueil de l’Orient.
Pique-niquer avec elle en plein milieu de la boutique, goûter ses nouvelles créations est un régal à chaque fois renouvelé.
Baignée dès sa naissance dans l’art et l’élégance côté maternel, dans le savoir-faire et la délicatesse côté paternel, plusieurs fées se sont penchées sur son berceau.
Avec elle, je partage beaucoup de traditions de table levantines et de plats qui nous ont bercées toutes deux de parfums d’agneau, de coings et de cannelle. Plus une passion pour le beau et le bon à table.
Nour Halwani a fait partie du jury de la neuvième édition du prix littéraire Ziryab. Le petit déjeuner qu’elle nous avait servi avait totalement émerveillé par son élégance et la qualité des produits choisis la délégation du prix. Totalement fidèle à l’idée du Ziryab, il est resté dans toutes les mémoires !
Nour, pouvez-vous nous raconter l’aventure de Goodies ?
Goodies a démarré en 1979 à Verdun lors d’une accalmie de la guerre civile libanaise.
Suivant les conseils de son père Misbah, gourmet averti, mon père Rabah Halwani, avec son frère jumeau Amine et son autre frère Malek a établi l’enseigne Goodies et sa phrase éponyme en proposant le meilleur des produits locaux et une sélection de produits importés triés sur le volet.
Le rayon traiteur et les plats du jour ont suivi avec toujours en ligne de mire le meilleur du meilleur.
La boutique de Ferney Voltaire a été inaugurée dans les années 80. Mes parents venaient de se marier et la famille de ma mère avait donné son accord pour le mariage à condition que le couple puisse vivre loin de la guerre et de Beyrouth. Ce fut chose faite et grâce à Dieu le succès a suivi et perdure depuis. (et régale toujours la région de Genève et bien au-delà ainsi que le Jura frontalier franco-suisse ndlr!)
Pouvez-vous nous raconter votre parcours personnel ? Votre formation ?
J’aime l’histoire et l’art sous toutes ses formes. J’ai donc suivi une formation d’histoire de l’art même si j’ai toujours baigné dans l’art gastronomique !
Je suis née dans une famille libanaise du côté paternel et syrienne Alepine, du côté de ma mère. J'ai donc toujours été entourée de toutes sortes de plats riches de saveurs, d'arômes et d’épices.
En grandissant, j’ai appris à mélanger aux fourneaux les saveurs de la cuisine syrienne et libanaise, et j'ai tout appris de ma mère Zinnia, que son âme repose en paix. Dans la famille de mon père la nourriture a toujours occupé une place centrale.
Mon père et ses frères avaient repris l'activité de mon grand-père Misbah et établi en 1979 l’enseigne de "Goodies". J'ai littéralement grandi dans cette boutique, observant mon père et mes oncles choisir, sélectionner et construire minutieusement les étalages de fruits et de légumes avec une belle harmonie de couleurs qui flatte le regard ; totalement passionnés par leur travail et par la recherche de l’excellence des produits.
J'ai donc été bercée par l'amour de la cuisine des deux côtés de ma famille. Aujourd'hui, je gère le département traiteur avec ma tante Nada. J’apporte ma touche personnelle bien sûr et insuffle de nouvelles idées en respectant la tradition mais en y faisant entrer un peu de fantaisie.
Sur ma page Instagram @noushkalicious et sur celle de @goodiesbeirut je partage des recettes simples, souvent revisitées.
Comment avez-vous eu le déclic pour “entrer ” vous-même en Gastronomie ? Gérer est une chose, mettre au point des recettes en est une autre.
J'ai depuis toujours été entourée de saveurs subtiles. J'ai grandi en regardant ma mère transformer des ingrédients simples en plats délicieux. Mon père s’occupait des matières premières toujours d’excellente qualité !
Le déclic a eu lieu un jour où je suis arrivée dans la cuisine pour observer ma mère qui préparait la 'safarjalieh', un plat syrien à base de coings avec de la viande d’agneau ou du kebbeh dans une sauce à la grenade.
L'arôme, l'odeur… les couleurs … J’étais totalement captivée. Tout était en harmonie et à l’arrivée délicieux !
À partir de ce jour-là, dès que je n'avais pas de devoirs à l'école, je passais mon temps avec ma mère à découvrir ses secrets culinaires pour préparer ces plats spectaculaires.
De plus, je passais aussi mon temps libre l'après-midi avec ma tante Nada également experte en cuisine. Célèbre pour ses talents exceptionnels de décoration culinaire. Elle réalisait des sculptures sur légumes et fruit, créait carrément des fleurs à partir d'aubergines, de carottes et de betteraves avec à l’arrivée de véritables tableaux. Une véritable œuvre d’art.
Franchement avec la chance d'avoir tout cela autour de moi, je dirais qu'il m'était impossible de ne pas devenir la personne que je suis, tant ma vie a été imprégnée de passions transmises par mon entourage pour la gastronomie et l'art culinaire.
Votre plat préféré ? Un dessert préféré ?
Je suis curieuse de toutes les cuisines et de tous les goûts mais j'opterais pour les 'kwaysat', ou comme on les appelle à Alep, 'bishmaskat' : Une belle hampe de bœuf ou un roulé de viande hachée, mijotés dans une sauce tomate et servis avec du boulgour ou du riz. Miam, je peux presque en sentir le goût en ce moment !
Coté desserts, je choisirais la 'zarda', un dessert d'Alep que ma mère préparait. C'est un pudding de riz de couleur jaune, confectionné avec du safran garni d'amandes grillées et de pignons de pin torréfiés. Lorsqu'elle le préparait, l'arôme du safran embaumait toute la maison. C'était succulent.
Si vous deviez aller vivre sur une île déserte quel est le produit indispensable que vous emporterez dans vos bagages ?
Ce serait sans hésiter le 'zaatar'. J'en mets presque partout : dans les vinaigrettes, les sauces, sur la viande, le poulet, les salades… On peut littéralement l'utiliser dans tout, et c'est toujours délicieux.
Avez-vous déjà essayé de tartiner un mélange de zaatar et d'huile d'olive sur une tranche de pain grillé (toast), puis d'ajouter des figues fraîches et un filet de miel ? Miam, c'est l'un de mes snacks préférés." (Bien sûr mon général … Et je ne peux qu’approuver ! ndlr)
Avez-vous un projet personnel en cours côté gastronomie ?
Mon rêve aujourd’hui est de montrer l’art qu’est la cuisine et le champ des possibles qu’elle permet avec une ouverture sur le monde à travers les goûts, les saveurs et leurs associations.
Je n'ai pas de projets précis en ce moment. Ma page Instagram compte actuellement 43.000 abonnés, et je souhaite la développer davantage. Je voudrais continuer à m'améliorer en suivant des cours d’apprentissage culinaire mais il faut trouver le temps. Comme je le dis toujours, on n'a jamais fini d'apprendre, surtout lorsqu'il s'agit de gastronomie.
J'adorerais publier mon propre livre de cuisine, et j'aimerais que le premier soit consacré aux saveurs souvenirs nostalgiques que j'ai maîtrisés grâce à ma mère, avec une fusion de saveurs libanaises et syriennes. En outre, j'aimerais aussi avoir un jour ma propre émission de cuisine à la télévision.
Vaste programme savoureux et prometteur que l’on souhaite à Nour de concrétiser au plus tôt !
« Les goûts de Winston sont très simples. Tout ce qu’il veut, c’est le meilleur. » avait dit Frederick Edwin Smith, comte de Birkenhead, en 1941 parlant de son grand ami Winston Churchill :
Dans le quartier de Verdun à Beyrouth, cette phrase a dû certainement résonner à l’oreille de la famille Halwani parce qu’ici le meilleur est cultivé tous les jours, depuis le premier jour de Beyrouth et à Ferney, contre vents et marées !
Nour Halwani est sur Instagram
Et sur @Goodiesbeirut
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