Dr. Nabil Okais est une référence et un nom bien établi dans la neurochirurgie au Liban. Il est aussi professeur de philosophie et propriétaire des « Terrasses de Abdelli », un havre de paix qui reçoit les citadins assoiffés de paix, d’air frais et de sérénité pour un meilleur bien être.
Dr Okais sera présent lors du forum Beauty & Wellbeing qui se tiendra au Forum de Beyrouth du 18 au 21 avril. Il répond aux questions de l’Agenda Culturel.
Pouvez-vous vous présenter pour nos lecteurs ?
J'ai fait 40 ans de carrière en neurochirurgie. Je me suis particulièrement intéressé au problème des douleurs chroniques, surtout le mal de dos. J'ai constaté, avec l'expérience, que chez un grand nombre de ces patients la douleur qui résistait à tous les traitements, n'avait pas de lésions organiques en relation avec ces douleurs. Par une écoute attentive de leurs symptômes, j'ai trouvé qu'ils étaient plutôt dus à un mal-être qu'ils voulaient, inconsciemment, ignorer. L'approche psychologique ou psychiatrique n'a pas montré d'efficacité chez eux.
J'en ai conclu que le meilleur traitement de ce mal si fréquent, serait de les amener à chercher le bien-être dans leur vie.
J'ai entamé, dans cette optique, à l'âge de cinquante ans, des études de philosophie pour atteindre le niveau de master. Cela m'a beaucoup aidé à mieux comprendre la nature humaine et les causes du mal-être dont souffre une partie importante de l'humanité, et qui se manifeste souvent par des symptômes organiques qui peuvent être détectés uniquement par un médecin conscient de son rôle de thérapeute non seulement d'un corps dont il serait un simple technicien, mais de l'humain dans ses deux dimensions physiques et spirituelles. Celui qui mérite vraiment le titre de hakim, ou le sage, comme l'étaient les médecins depuis l'antiquité, la majorité d'entre eux étaient à la fois médecins et philosophes, depuis Hippocrate jusqu'à Averroès, en passant par Galien, Avicenne et tant d'autres.
Ains, j'ai pu convaincre les responsables de la faculté où j'étais professeur, à introduire une nouvelle matière au cursus, qui comporte une introduction à la philosophie. Le cours que j'assure toujours connaît un grand succès. Cela me donne la satisfaction de pouvoir influencer, un tant soit peu, la carrière d'un grand nombre des médecins de demain.
J'ai aussi pensé que le meilleur moyen d'amener les gens, même ceux qui n'ont pas de symptômes organiques, à connaître un certain bien-être, serait de les sortir, ne serait-ce que quelques jours par an, du cadre de vie dans lequel ils sont engloutis, pour se donner le temps de s'interroger sur le vrai sens de leur vie afin de se donner de vrais objectifs correspondant à leur être profond et authentique.
Retrouver un cadre naturel de beauté et de pureté, avec un retour à la vie simple, m'a semblé le chemin le plus adéquat pour atteindre cet objectif. J'ai cherché, en faisant des marches dans les différents coins du Liban où la nature pouvait offrir à la fois la splendeur du paysage, la pureté de l'air et l'éloignement de toute nuisance auditive. Cela m'a permis de découvrir combien notre petit pays regorgeait de trésors de ce genre. J'ai pu enfin trouver la perle que je cherchais, une colline vierge avec des ruines de maisons abandonnées depuis plus d'un siècle, une superficie suffisamment grande pour éviter toute possibilité de contamination ultérieure, assez proche de la mer tout en étant assez loin des axes routiers, avec une vue imprenable sur les collines avoisinantes et l'horizon méditerranéen.
En quelques années j'ai pu aménager un espace accueillant avec des chambres d'hôtes, une ferme, un potager, un vignoble, et d'autres facilités dans l'objectif de créer une activité durable, et de pouvoir accueillir toute personne à la recherche de bien-être. L'entreprise est fonctionnelle depuis près de dix ans, offrant des opportunités d'emplois aux habitants des villages avoisinants.
En tant que médecin, comment envisagez-vous la prise en charge du bien-être au Liban?
En tant que médecin, je trouve que la prise en charge des maladies doit tenir compte du rôle fondamental du bien-être dans la santé physique et psychique.
La prise de conscience, par les médecins, de cette notion est capitale.
Une fois que le clinicien a fait le diagnostic de mal psychosomatique, il doit faire appel à des spécialistes dans le domaine. La création de centres multidisciplinaires incluant les deux disciplines en vue d'étudier les solutions à proposer à chaque cas, est très utile pour mieux aiguiller les malades. Parmi ces solutions, l'éloignement périodique de l'activité de routine pour de courts séjours dans un cadre de nature avec ou sans accompagnement adéquat, est une option qui peut être extrêmement efficace.
L'accès au bien-être ne doit pas être réservé aux personnes souffrantes physiquement, et qui font appel aux soins médicaux, il est encore plus utile et efficace chez toute personne qui cherche à accéder à une vie meilleure, à tous les points de vue. Non seulement ceci jouerait un rôle préventif pour beaucoup de maladies, mais permettrait aussi de trouver plus de bonheur et de performance.
Quelle est l'importance, en tant que neurochirurgien, de votre présence à cet événement ?
Comme je l'ai déjà signalé, le médecin doit jouer un rôle central dans toute initiative qui tend à offrir au plus grand nombre l'accès au bien-être. Ce dernier étant un outil thérapeutique et préventif dont devrait bénéficier chaque praticien de la médecine. Ce rôle consiste à éclairer le public sur la relation étroite entre le bien-être et la santé. Mais aussi pousser les différents acteurs dans ce domaine à aller plus loin dans leur tâche pour être de plus en plus présents et efficaces.
Observez-vous un intérêt croissant des Libanais pour la compréhension des questions de santé publique.
Les libanais sont ouverts à l'information venant de toutes les sources et des quatre coins du monde. Le thème du bien-être est peut-être le plus fréquemment présent dans la littérature actuelle et les réseaux sociaux. Nos concitoyens, comme toute la population éduquée dans le monde, sont bien sensibilisés à ce sujet. Certains, qui disposent des moyens pour cela, n'hésitent pas à faire de longs voyages en quête de lieux spécialisés dans ce domaine. La nature libanaise et les personnes qualifiées disponibles, devraient pouvoir offrir à un plus grand nombre l'accès à ce service dans les meilleures conditions pour un coût raisonnable.
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