Espace fann : un studio artistique aux ambitions multiples
09/02/2022|Juliette Pirot-Berson
Des murs couverts d’œuvres d’arts de toutes les couleurs et deux femmes aux sourires radieux. C’est le décor d’Espace fann à Beyrouth, qui propose une grande variété de cours d’art à prix abordables. Mais ce lieu est bien plus qu’un espace de création artistique…
Broderie, tricot, peinture, aquarelle, calligraphie, création de bijoux....La liste est longue et se développe avec les années. Animés par une quinzaine de formateurs, ces cours sont ouverts à tous les niveaux et à tous les âges.
"Je voulais étudier le design de bijoux et le design textile et je n'ai pas trouvé d'opportunité ici pour étudier, sauf à l'université, qui était très chère pour moi », explique Yasmine Dabbous, qui a fondé Espace fann en octobre 2018. Cette ancienne professeure en journalisme qui s’est consacrée à l’art a été rejointe l’année suivante par Nour Tannir, architecte d’intérieur. Les deux entrepreneuses proposent des cycles de formations artistiques de niveau universitaire mais à moindre coût et dans un esprit d’atelier, avec seulement 6 étudiants par cours.
L’objectif premier d’Espace fann est donc de démocratiser l’art au Liban en le rendant accessible au plus grand nombre. Mais la mission ne s’arrête pas là. Les deux associées encouragent leurs étudiants à considérer la création artistique comme une activité viable et les accompagnent dans leur professionnalisation. "Je dis toujours que je n'aime pas vraiment l'influence que l'histoire de Van Gogh a sur les gens", explique Yasmine Dabbous, pour qui le récit dramatique de la vie de l’artiste a découragé de nombreuses carrières artistiques. Aujourd’hui, sur près de 300 étudiants passés par Espace fann, dont la grande majorité sont des femmes, environ 15 % ont créé leur propre entreprise. Un chiffre important car, dans le contexte de crise actuel, ces micro-entreprises constituent parfois un pilier essentiel pour les ménages.
C’est dans cette optique qu’Espace fann a lancé il y a presque un an sa boutique en ligne. Un moyen de soutenir le travail de leurs étudiants en vendant leurs œuvres et de générer un nouveau revenu pour faire vivre Espace fann. Sur la boutique, plus de 370 articles sont disponibles. Chaque pièce est unique et une large gamme de prix est représentée pour convenir à tous les budgets. La livraison est possible au Liban et à l'étranger.
Une autre ambition a émergé naturellement pour Espace fann avec la situation au Liban : la guérison par la création artistique. Les deux gérantes sont convaincues de l’effet thérapeutique de l’art et cet objectif fait désormais partie intégrante de leur mission. Elles regorgent d’anecdotes sur des étudiants pour qui les cours suivis à Espace fann les ont aidés à surmonter un traumatisme, à faire face à un deuil ou encore à se réinsérer dans le monde professionnel. "Chacun d'entre eux a une histoire, et nous les accompagnons", explique Nour Tannir.
Une incitation à prendre soin de soi renforcée par la pandémie et les confinements. "Les gens étaient plus encouragés à faire des choses qui les rendraient heureux chez eux, à avoir un hobby ", poursuit-elle.
Pour beaucoup, l’expérience Espace fann a été déterminante. « Je ne serais pas là où je suis aujourd'hui sans Espace fann. L'expertise, le soutien, l'encouragement et la créativité de chacun m'ont permis d'entamer un incroyable voyage artistique qui ne cessera de se développer » , déclare Nour (@_._threadymercury_._), qui a développé une activité de broderie.Bettina (@constantcravingbrands) qui conçoit et customise des vêtements va dans le même sens. « Espace fann m'a donné le courage de poursuivre un rêve que j'avais perdu depuis longtemps, de ne pas me contenter d'avoir constamment des idées, mais de les réaliser enfin ».
Espace fann marque l’esprit de ses étudiants. Pourtant, le chemin n’a pas été simple. « C’est difficile depuis le premier jour », confie Yasmine Dabbous, toujours avec le sourire. Révolution de 2019, dévaluations monétaires successives, pandémie et confinements sans oublier l'explosion du port qui a endommagé leurs locaux : les premières années d'Espace fann n'ont pas été de tout repos. Lorsqu'on les interroge sur l'avenir, les deux collaboratrices expliquent qu'elles s'adaptent au quotidien. "Au Liban, c’est très difficile de planifier, ce n’est ni de l’espoir, ni du désespoir, je prends les choses comme elles viennent", continue la fondatrice. Ce qui est certain, c'est que leur détermination n'est pas prête de faiblir.
www.espacefann.com
+961 3 866 368
@espace_fann
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