Trop d’anglicismes font le buzz
La langue anglaise connaît aujourd’hui un essor remarquable. Les avantages de l’anglais devenu la langue de la révolution technologique, de la recherche et de la communication, ne font aucun doute. Cependant, en quelques décennies et du vivant de nombre d’entre nous, d'innombrables anglicismes ont envahi la langue française encouragés par les medias qui sont en première ligne pour la transmission des évènements. Les reportages et autres chroniques des journalistes ponctués de mots anglais intrus, sont suivis et repris par des millions de francophones sur les écrans, écoutés sur les radios ou lus dans la presse. Leur influence sur le public francophone est immense.
Dans les années quatre-vingt, on évoquait encore les francs-tireurs sur lesquels ont tant tiré les snipers qu’ils les ont éliminés du paysage linguistique français. Les immeubles ont fait place aux buildings, les réunions sont remplacées par des meetings, l’ovation debout a été reléguée aux oubliettes au profit de standing ovation. L’avenir, certes, n’est plus en ligne de mire, le futur l’a détrôné.
Quant au joli mot florilège, il a disparu au profit de best of, tandis que le diplôme de maîtrise a échoué à garder sa stature française au profit du diplôme de master. Depuis belle lurette, on ne se lance plus de défis gagnés par les challenges, sans parler des réclames échangées pour la pub. Pourquoi ces emprunts superflus ? Ce n’est pas cool. Il est regrettable d’assister depuis quelques décennies au déclin si rapide du français.
La terminologie de l’informatique a imposé l’anglais naturellement et sans ambages à une grande partie de la planète et au Levant. Néanmoins, les anglicismes ont quasiment envahi les secteurs de la mode (Fashion victim, vintage, must have), les sports, (sponsor, pub), l’économie, (cash, crash), etc. et s’imposent à tout venant. Ces emprunts qui font le buzz ne représentent qu’une infime partie d’une liste trop longue à énumérer. Et ce n’est pas une fake-news.
Au Liban, nous ne pouvons que constater le net recul du français au profit de la langue de Shakespeare. L’expression couleur locale Hi, ça va ? a pris le pas sur bonjour. Miss Liban est détrônée par Miss Lebanon. Dans les boutiques, les soldes si familières des années soixante-dix ont laissé la place aux sales. Les nouveaux panneaux de signalisations routières affichent Street au lieu de Rue. Le français semble perdre pied rapidement et sûrement.
Cependant, à l’occasion, certains mots anglais sont utilisés dans le langage français car ils expriment précisément une idée plus ou moins vague ou approximative dans la langue de Molière. Gisèle Kayata Eid, écrivaine et journaliste, souligne «qu'être francophone et francophile ne l'empêche pas pour autant d’être tentée de recourir aux mots anglais si pratiques tels que enjoy qui n’a pas vraiment son corollaire en français». Elle note à titre d’exemple que «heal exprime à la fois les actions de guérir, soigner et soulager.»
Les langues évoluent, s’enrichissent d’emprunts surtout à l’heure de la globalisation et c’est en ceci qu’elles sont vivantes, toutefois, le locuteur a aussi sa part de responsabilité dans la transmission du langage. Céder trop facilement à un effet de mode en empruntant des mots étrangers par snobisme ou pour prétendre connaitre des mots étrangers alors que ces mêmes mots existent en français, n’aide pas au renforcement de la langue de Molière.
- Do you speak franglais ?
- Oui, I do.
Mad in France.
Illustration : Raphaëlle Macaron
Extraite du livre Faux et usage de fautes, Mieux parler français au Liban. Dounia Mansour Abdelnour
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