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Lecture 44 : Mille secrets Mille dangers, Alain Farah, Le Quartanier, 2021

02/03/2023|Gisèle Kayata Eid

Un titre qu’il portait depuis 8 ans et qui lui a porté bonheur.
 

Dans un spécial Diaspora qu’avait lancé l’Agenda culturel, j’avais rencontré à Montréal, Alain Farah, il y a exactement sept ans. Il m’avait annoncé qu’il écrivait un livre (déjà) intitulé « Mille secrets Mille dangers » « qui retrace la complexité, la fluidité de passage de ces Chrétiens d’Orient qu’on appelle les Shawwam et qui ont tant circulé entre le Liban, la Syrie, l’Égypte et les pays avoisinants ».
 

Huit ans plus tard, voici ce roman autobiographique de 500 pages couronné par les prestigieux Prix littéraires du Gouverneur général, dans la catégorie Roman et Nouvelles (à l’automne 2022), après avoir remporté le Prix Ringuet de l’Académie des lettres du Québec et avoir été finaliste aux Prix des libraires et au Prix littéraire des collégiens. Pour couronner ce succès exceptionnel, le roman sera porté au grand écran par Philippe Falardeau (à qui on doit, entre autres le film « Monsieur Lazhar »).
 

C’est dire l’engouement de tout le milieu littéraire pour ce Libano-Québécois qui se raconte comme il l’avait prévu depuis le début : « Je suis moi-même la matière de mon livre » qu’il m’avait avoué en reprenant à son compte la phrase de Montaigne.

L’action se déroule le jour de son mariage. Journée mémorable en elle-même, truffée d’accidents, de contretemps, de révélations, de surprises... Mais aussi une occasion pour revoir tout son monde et présenter à travers eux tout ce qui fait qu’un homme souffre, désire, espère, connaît, expérimente, dépasse, craint... jusqu’à la trentaine. 

On y retrouve des informations sur le Caire que ses parents ont quitté pour s’installer au Liban, leur installation au Canada, leur divorce, l’adolescence de ce jeune brun, aux cheveux crépus qui veut trouver sa place dans la société d’accueil, au-delà des superstitions de sa mère ou de son identité libanaise très présente qui « joue un rôle fondamental dans (sa) psyché. C’est un peu cet aspect du joueur compulsif, négociateur, qui trouve la bonne rue et déniche la bonne affaire». 
 

Un roman très dense, bourré de détails qui raconte le deuil, l’amitié, la maladie, les blessures d’enfance, les folies de jeunesse, le premier grand amour, les rancœurs, les projets, .... La panoplie des émotions que l’auteur nous transmet sans craindre de donner le nom d’Alain Farah à son héros en proie à des crises de panique, atteint d’une maladie chronique, amoureux transi et éconduit, ami fidèle mais terrassé par la maladie puis la mort injustifiable de sa meilleure amie...
 

L’écriture de ce livre-fleuve qui a exigé huit ans de rédaction est une plongée exploratoire, qui se veut exutoire, dans le monde de ce jeune levantin en terre d’exil en proie à ses peurs et ses ambitions... Qui a pourtant gravi brillamment les échelons de la réussite puisqu’il est professeur de littérature française à l’Université Mc Gill, chroniqueur littéraire à la radio de Radio-Canada et auteur de nombreux ouvrages dont des poèmes, une bande dessinée, ainsi que plusieurs romans dont « Pourquoi Boulogne » et « Matamore No29 ».

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