Un roman d’amour, mais pas n’importe lequel. Celui du désespoir, de la folie, de l’imprévu, de la provocation, de la tendresse, de la poésie. Une histoire romanesque comme on peut l’imaginer, qui nous fait rêver mais qui vient aussi nous chercher. Et si nous étions tous des assoiffés « d’échappées du quotidien » comme Aurore qui précise « Je ne vous demande pas de la tromper, je vous demande de m’aimer » ou comme Simone qui face à cette inconnue se dit : « J’aimais vivre soudain » ?
L’histoire n’est pas banale. Ils se croisent un soir. Elle lui dit demande de l’emmener. Elle ne sait pas où, pas plus qu’elle ne sait à qui elle s’adresse. Nous non plus. Si elle se révèle tout le long de la première partie, on ne comprend pas les motifs de l’homme accosté qui a embarqué très vite dans ce fantasme. On ne comprendra pas non plus pourquoi son mari avec qui elle partageait une passion intense, et toujours vivace 30 ans plus tard, voulait la quitter un soir d’automne. Et si la seconde partie nous renseigne sur cet homme avec qui elle passe une nuit entière (et pas celle que vous imaginez), c’est bien à la fin du livre que l’énigme est résolue.
En attendant, nous sommes happés par cet « homme et une femme capables de se jeter dans le vide par amour. Parce que c’est vivre sans amour qui est l’enfer ».
Tricotée-serrée, puissante, cette rencontre nocturne de deux solitudes qui déambulent dans Paris à « l’heure fauve, lumières diffuses derrière les rideaux, gémissements étouffés dans les ombres, toutes les clandestinités », raconte sur deux cent pages, comme dans un film, les facettes inavouables de l’amour. « On n’est jamais soi, on est toujours ce que l’autre s’est inventé ».
Toute en finesse, l’écriture de ce romancier, à qui on doit 10 romans dont plusieurs autobiographiques, suinte beaucoup de sensibilité : « Elle est là la victoire du couple. La persistance. La résistance comme un acte de guerre. Elle est de clamer. Nous avons traversé. Nous sommes invaincus ».
« Il y avait quelque chose d’extrêmement troublant, presque une indécence, à marcher ainsi main dans la main avec une parfaite inconnue... Mon vertige venait de ce que cette intimité n’avait pas été acquise au terme d’une danse de séduction, jolis mots, roucoulades, mais qu’elle avait été innée, offerte, elle était l’inatteso... L’inattendu est le feu, l’inconnu, la plus belle promesse. »
« Car il ne reste que le feu ».
Le livre est disponible à la Librairie Antoine
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