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Organiser les bus de Beyrouth : impossible n’est pas libanais

29/04/2022|Clémence Buchsenschutz

« Tripoli, Saïda ! ». Dora, 16h, les passagers se pressent sur la place, alpagués par les chauffeurs de bus.

Comment prendre le bus à Beyrouth ? La ville autrefois surnommée le « Paris du Moyen-Orient » fait bien pauvre figure dans ce domaine-là. 

 

Un réseau de bus anarchique

Amanda Mouktar, résidente de Jbeil de 33 ans, déplore un manque d’organisation : « il n’y a ni arrêts ni horaires ».

Il existe en fait trois stations de bus : Dora, Charles Helou, Cola. « Là-bas les chauffeurs crient le nom des destinations, mais parfois deux d’entre eux se disputent les passagers : c’est le bazar », poursuit-elle.

Ce bazar, les autorités libanaises en ont pris conscience. Le 24 mars 2022 se tenait au siège des Nations-Unies de Beyrouth, une conférence organisée par ESCWA et UN-habitat sur le développement des transports publics. 

Mme Faten Abou Hassan, directrice générale des municipalités et des collectivités locales au ministère de l’intérieur libanais, a d’entrée de jeu mis en exergue les problèmes liés au réseau de transport : « nous avons de pauvres transports publics pour une grande densité de circulation. La crise et le manque d’essence ne font qu’accentuer cela ».

Appuyant ces propos,Ziad Nasr, directeur de l'autorité des transports publics souligne l’urgence d’un remaniement : « un système de transports publics est un besoin prioritaire, avant tout le reste ».

 

Pourquoi ce désordre ?

Selon le Dr Nakkash, expert en transports, l’origine de cette désorganisation est « la conséquence des politiques erronées qui ont alimenté les actions du gouvernement au cours des trente dernières années ». 

En effet, au XIXème siècle Beyrouth possédait un tramway et un train mais ils furent délaissés, ne laissant plus d’autre alternative pour les transports collectifs que le bus. 

Selon l’enquête de 2009 de l’IRU sur le transport routier au Moyen-Orient, aujourd’hui environ 80% des habitants du Liban prennent la voiture et seulement 1,7% les bus.

Cependant, avec la grave crise économique et la pénurie d’essence que connait ce pays, le bus est plus que jamais un transport à exploiter. 

S’ajoute à cela un constat écologique alarmant : selon le rapport MoE (2015), le transport routier produit 27% des émissions de CO2, et cette émission polluante au Liban vient surtout de la voiture.

Des initiatives en route

En réponse à ce défi colossal, des initiatives citoyennes voient le jour.

Le 10 mars 2022, le ministre français délégué aux transports Djebbaria offert cinquante bus au Liban. « Mais à quoi cela servirait-il si nous n’avons pas déjà un système intégré ? » remarque Mr Nasr. 

 

Cartographier l’ensemble des lignes de bus, c’est le pari de Chadi Faraj, co-fondateur de l’application BusMapProject.  À l’origine chauffeur de van de bus et web-développeur, Chadi a constaté qu’il y avait beaucoup à faire pour organiser les lignes de bus.

En 2015, accompagné de quatre passagers, il part à la rencontre d’autres conducteurs de bus et recense les données nécessaires à son projet : trajet, horaires, coûts. Se sont ralliés à eux des bénévoles : chacun suivant une ligne de bus différente, faisant de ce travail colossal un projet participatif.

Leur objectif : faciliter l’accès aux lignes de bus afin de propulser ce moyen de transport, diminuer la pollution et les embouteillages incessants.

 

Cette initiative a aussi permis la formation d’une communauté des passagers de bus rassemblés dans l’ONG Riders’ Rights travaillant pour l’accessibilité aux bus à tous et la promotion de l’inclusion de toute ethnicité, sexe, âge, statut social ou tout handicap.

Riders' Rights vise à défendre les droits fondamentaux des usagers et à encourager l'utilisation du réseau de bus et de camionnettes existant comme l'un des principaux moyens de mobilité, tout en créant des alternatives ou des solutions supplémentaires pour le secteur.

C’est un projet qui est né non sans difficulté : il leur a en effet fallu trois années pour obtenir l’accréditation de fonder cette ONG.

 

Aujourd’hui, l’application BusMapProject donne à plus de 18.000 utilisateurs les informations précises et actualisées de leurs trajets.

 

A savoir

www.busmap.me 

@busmapproject

 

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