Le monde culturel du sud Liban peut enfin espérer un réveil : le café Ishbilia, véritable institution de l’antique ville de Saïda a rouvert ses portes depuis septembre 2018. Cet espace culturel multidisciplinaire disposant d’une splendide salle de théâtre/cinéma de 447 sièges est en train de redynamiser toute la région sur le plan artistique. Après onze ans de fermeture, le premier cinéma indépendant d’art et d’essai de la ville qui avait ouvert en 1980, se donne aujourd’hui pour ambition de promouvoir les artistes libanais et arabes. Rencontre avec Hiba Zibawi, aujourd’hui gérante du Ishbilia.
Est-ce que Ishbilia est l'unique cinéma/théâtre de Saïda ?
Le théâtre Ishbilia, et l’espace culturel qu’il offre, constituent effectivement la seule et la première maison d’art indépendante de la ville. C’est mon père, Adnan Zibawi, qui l’avait fondé en 1980. Il y a onze ans, il l’avait fermé. Mais aujourd’hui nous avons rouvert avec une nouvelle vision qui, nous l’espérons, attirera l’intérêt de la population de Saïda et du sud du Liban.
Quel genre de films projetez-vous dans le cinéma, et quel genre de pièces de théâtre s’y jouent ?
Il y a 5 mois, quand nous avons rouvert, nous nous sommes donné pour but de décentraliser la scène artistique de la capitale vers le sud. Nous cherchons à aider le cinéma contemporain indépendant libanais et arabe. Nous avons déjà projeté plus de 15 films indépendants libanais et arabes et fait jouer 5 pièces de théâtre égyptiennes et libanaises. Nous sommes aussi partenaires avec les cinéma Metropolis pour les programmes scolaires et nous avons participé au festival du cinéma européen en janvier et février. Nous travaillons aussi avec la compagnie panarabe MAD Solutions pour la projection de films.
Pourquoi avez-vous décidé de mettre en lumière des productions libanaises et arabes ?
Car nous croyons que beaucoup d’artistes libanais et arabes le méritent, et c’est pourquoi nous cherchons à les promouvoir. Nous sommes bien conscients de l’environnement géographique dans lequel nous vivons, ainsi que des défis que doivent surmonter ces artistes. Nous voulons les aider en leur offrant un espace leur permettant d’exposer leur travail.
N’importe quel artiste peut venir frapper aux portes du Ishbilia et exposer son travail ?
Ishbilia est un lieu ouvert à tous et nous espérons attirer des artistes issus de divers horizons comme la danse, la musique, l’artisanat ou n’importe quel genre d’expression artistique aux côtés du cinéma et du théâtre.
Il y a aussi un café Ishbilia, qu’est-ce qu’on peut y faire ?
Le café Ishbilia est une partie intégrante du monde culturel de Saïda. Il offre la possibilité de louer un large espace facilitant différentes productions artistiques et sociales ou encore commerciales. On accueille des expositions, des ateliers, des lectures, des conférences et autres meetings en tout genre.
Des employés ou des étudiants y viennent pour le calme, l’internet et les différents produits alimentaires proposés par le café : boissons chaudes, gâteaux, glaces…
Comment expliquez-vous la centralisation de l’art à Beyrouth ?
Beyrouth est une capitale, et c’est un fait qu’on retrouve dans de nombreux pays que l’art s’y trouve concentré plutôt que dans les autres villes. Nous devons beaucoup à notre capitale pour ce qu’elle offre sur le plan culturel, mais nous pensons que la décentralisation de l’art est une nécessité, parce que d’autres villes, d’autres populations, ont besoin et méritent d’être confrontés à une richesse artistique variée. Si je devais donner une raison à cette centralisation, je dirais que la faute revient à l’absence d’aides financières de la part du gouvernement libanais.
Espérez-vous vous ériger en exemple pour d’autres villes libanaises ?
De nombreux individus à Saïda et dans le sud ont essayé et essayent encore de développer la scène culturelle dans leurs villes, et nous les saluons pour leur travail. Nous croyons que toutes les villes, et Beyrouth comprise, se battent pour maintenir et créer une vie culturelle en raison du manque d’aides financières, c’est pourquoi nous croyons que tous les activistes et lieux culturels se battent pour une même cause. Nous espérons avant tout être un exemple pour nous-mêmes, nous améliorer et grandir jusqu’à atteindre une autonomie durable et suffisante, et en ce sens, nous espérons faire office de référence pour d’autres villes.
Comment se porte la vie culturelle à Saïda ?
A Saïda comme dans le sud en général, ça ne va pas très fort, pour plusieurs raisons, et la guerre est certainement la plus importe de ces raisons. De nombreuses organisations ont essayé ces dernières années d’améliorer et de développer la vie culturelle ici, et ils ont fait un bon travail tout de même. Le défi véritable de Ishbilia est de créer une vie culturelle qui soit consistante et durable : notre mission est d’avoir un impact fort sur la population de notre ville en leur montrant de nouvelles formes d’art. A force d’événements, nous deviendrons de véritables activistes culturels et pas seulement une audience passive.
Adresse : Houssam Eddine Hariri Street, Mosbah building (Bank Med)
Saïda, Al Janub, Lebanon
Tél : 71 270 090
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