La première fois, j’ai pensé que j’étais trop gourde. Je tournais en rond en me demandant comment j’ai pu m’engouffrer dans cette jungle marchande sans penser regarder une quelconque indication. Habituée aux voyages et à leurs ‘gates’ sécurisants, je cherchais ma porte d’embarquement désespérément, retournais sur mes pas, m’assurais de la bonne direction…
Aujourd’hui je sais. Avant le vol planifié, confirmé, numérisé, y a une autre sorte de vol qui le précède, celui de vos derniers sous… Au cas où il vous en reste. Pour atteindre son avion, il faut passer désormais et obligatoirement par les halls de la tentation. Brillants, lustrés, aérés n’exposant que quelques pièces, vous laissant désirer tout ceux qu’elles suggèrent. Un marketing agressif, tout en douceur, qui nous appâte pour mieux nous plumer et quels que soient nos talents pour prendre des selfies ou s’offrir ce qui nous tente.
Dans un monde crétinisé par quelques multinationales gargantuesques, la consommation orchestre une égalisation des peuples, ethnies et tutti quanti. Mêmes produits, mêmes gadgets, mêmes inutilités inondent les marchés, les zones franches, les souks traditionnels, les échoppes touristiques, les boutiques perdues… à moins de grimper sur les icebergs de l’Alaska ou de plonger dans la brousse africaine profonde et noire…
Sous prétexte de nous offrir du bonheur, les marques font leur cinéma pour nous asservir à leur cause, pour nous déguiser en ces clowns que la Halloween nous invite à glorifier.
A ce propos, c’est à se demander bien pourquoi cette autre messe de la consommation, plus qu’inutile, est célébrée à la même période que la Thanksgiving ?
Probablement qu’en ces temps de surconsommation débridée, il est bon de faire oublier à ces dindons de la farce que nous sommes tous devenus, le sens de cette fête. A savoir celui de la gratitude, de l’action de grâce, la pause après les vendanges et les récoltes, et le cortège d’émotions qu’elle charrie. Occasion pour remercier pour tous les dons de la vie et surtout pour ceux qui ne se vendent, ni ne s’achètent, ni se consomment, ni se consument : l’amour, l’amitié, la santé, les enfants, les parents, le plaisir de voir l’horizon rougir, de croquer une pomme, de crisser de contentement d’entendre ses pas sur les feuilles d’automne et la joie de partager tous ces bonheurs qu’aucun algorithme consumériste ne peut évaluer.
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