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Confessions en temps de guerre : Bruno Tabbal

19/10/2024

Où sont nos acteurs culturels en temps de guerre et que font-ils ?

L’Agenda Culturel est allé à leur rencontre pour les interviewer et les écouter.

 

Bruno Tabbal, artiste. Vit à Beyrouth.

 

Comment allez-vous ?

Je suis très anxieux. En colère, je me sens impuissant aussi… J’ai toujours été très perméable à mon environnement, et par conséquent j’ai très, très peur et je fais des cauchemars. Je ne pense pas que mon état diffère de nous tous. Mais je me dis que j’ai la bénédiction d’avoir un toit et mon pain quotidien lorsque d’autres ont tout perdu. Ça m’aide à relativiser…

 

De quoi est fait votre quotidien en temps de guerre ?

Je suis la plupart du temps dans ma montagne dans le jurd de Batroun. Ici c’est calme et je me sens en sécurité. Je m’active à des tâches quotidiennes qui occupent mon esprit. Je fais surtout de la mouné : du rebb, du kecheck, du vinaigre, des confitures, de la awarma… Cueillettes diverses aussi, marches… Hier j’ai coupé du bois pour l’hiver. Des activités manuelles et physiques qui m’aident à garder un minimum de santé mentale. La nature m’apaise.

 

Continuez-vous votre activité artistique ?

J’étais sensé sortir mon roman début novembre, mais évidemment tout est en suspens pour le moment. Pourtant, je continue de travailler, entre deux mounés ! Je prépare la signature que je voudrais spéciale et immersive, en espérant qu’elle aura lieu un jour… Il y a aussi ma pièce de théâtre qui était prévue pour février que je tente de continuer à écrire, autant que possible. Mais c’est tellement difficile de trouver l’inspiration… Je crois qu’on a besoin de faire le deuil de cette période terrifiante pour pouvoir retrouver notre créativité à fond…

 

Comment envisagez-vous l’avenir du Liban ?

Je suis très pessimiste. Je suis terrifié. Nous n’avons rien appris de notre passé… Ce qui m’inquiète surtout c’est que nous sommes tellement divisés que je me demande comment on pourrait envisager de rebâtir un état digne de ce nom ! Sans notre unité nous courrons un très grave danger, et la nation libanaise risque de disparaitre. Alors tout ce en quoi j’ai voulu croire toutes ces années aura été vain. Je ne suis jamais parti je suis resté, j’ai combattu, j’ai aimé mon pays. Et si tout cela avait été un leurre ? Tout ce combat pour mettre en avant notre identité, nos richesses culturelles, rurales, nos traditions… tout aura été inutile, et ma détresse est immense…

Aujourd’hui, cet avenir repose sur une unité véritable, c’est crucial voire vital dans l’instant présent. Et je ne cesse de le répéter sur les réseaux sociaux en me disant que si je peux contribuer de cette façon à réveiller les consciences et la raison, il faut le dire haut et fort. C’est un devoir de patriote. Et je tends la main à tous ceux qui pensent comme moi, quelles que soient leurs convictions politiques, leur foi et leurs croyances. C’est le SEUL moyen de sauver le Liban, personne ne le fera pour nous, et on a vu que les ingérences d’ici et de là (Est comme Ouest) n’ont fait que nous diviser, nous décevoir, nous asservir, etc…

Ceci dit, j’essaye de garder espoir, puisqu’il fait vivre ! Mais j’ai très peur, je l’avoue…

 

Pour tromper la peur, que suggérez-vous à nos lecteurs comme :

Livres : Les désorientés (Amin Maalouf), Un bon cru (Peter Mayle), La gloire de mon père (Marcel Pagnol), اسمع يا رضا/ Ismaa ya Rida (Anis Freyha), François 1er (Max Gallo)

 

Series : Derry Girls, After Life, Alpha males, Sex Education, Merli, Downton Abbey

 

Œuvres musicales : La voix de Feyrouz, de Abeer et Geoorges Nehme (Reflets du Liban que j’aime), The English Patient (Gabriel Yared), Varietés françaises des années 80 et 90.

 

Films: The Two Popes, Sing (1 et 2), Love Actually, The Lady in The Van, Chocolat, Singing in The Rain, The 100 Foot Journey.

 

Un dernier mot ?

Je continuerai mon modeste combat pour le Liban jusqu’au bout. J’essaierai d’être créatif et de promouvoir les richesses culturelles, littéraires, artistiques et surtout humaines de mon pays, toujours. Pareil dans le secteur culturel, nous devons nous retrouver, nous rapprocher. La culture et l’art sont une autre forme de résistance aussi. Une des meilleures.

 

 











 

 

 

 

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