”Il n’y a pas de hasard il n’y a que des rendez-vous..”
Et il y a des rendez-vous qui sont de véritables retrouvailles à travers lesquelles le monde semble tout à coup tourner plus rond.
Ma rencontre avec Marjorie Bertin est un de ces clins d’œil de la vie qui vous pousse à croire encore en l’humain. Nous aurions pu nous croiser des dizaines de fois, dans les couloirs de RFI, dans les rues de Reims, dans les vignobles de la Champagne où a grandi et réside aujourd’hui cette belle âme.
Au début de l’histoire un coup de fil et la voix douce d’Ysabel Saïah Baudis directrice des éditions orientales, qui m’informe que Marjorie Bertin, journaliste (Radio France Internationale et au courrier de l’Atlas) a écrit un livre sur Fayrouz, qui sort le 6 décembre et qu’elle désire offrir une partie des recettes de la vente à l’association les Petits Soleils.
Je ne connais pas Marjorie Bertin, par contre mon histoire d’amour avec Fayrouz est au moins égale comme tous les levantins à celui d’une terre que nous avons appris à célébrer en parenthèses et à cultiver sous toutes les latitudes. Fayrouz a accompagné notre adolescence sous les bombes, rythmé nos allers-retours entre deux continents et illuminé nos deux cultures. Une femme déesse vêtue de toutes les élégances et qui fédère au-delà de toutes les frontières.
Je connaissais ses blessures secrètes ayant partagé deux années durant les bancs d’un établissement scolaire Beyroutin avec sa fille Layal. Un goûter chez Layal était toujours intensément musical, son frère Ziad jouant du piano n’étant jamais très loin. Je connaissais l’existence de son autre frère handicapé dont elle ne parlait que très rarement et qui lui remplissait les yeux de tristesse.
C’est dire si deux heures d’immersion dans l’ouvrage de Marjorie extrêmement bien documenté, pétri de beauté dans lequel se mêlent avec intelligence textes et illustrations me font retrouver le fil des souvenirs et si je me laisse prendre par la petite musique de cette vie extraordinaire dédiée au chant et à la musique rythmée de perfection qui en mettant de côté ses multiples blessures à su offrir le meilleur d’elle-même.
Avec Marjorie nous prenons date et au delà des présentations c’est une véritable reconnaissance. Nous partageons nous semble-t-il un même regard porté sur la vie, le monde et l’humain.
Je cherche le lien avec Fayrouz, avec le Liban ou le Levant. Je cherche le point d’ancrage de l’ouvrage : un séjour au Liban, une éducation mixte levantine ? Eh bien pas du tout !
« C’est un de mes amoureux me répond l’autrice dans un éclat de rire qui m’avait fait découvrir Fayrouz. Je ne la connaissais pas du tout. Il n’était ni Libanais ni Levantin, français et juste amoureux de la voix de cette femme qui se chargeait d’un supplément d’émotions lorsqu’elle chante l’amour.
Il m’avait fait graver un disque comme cela se faisait à l’époque, avec la même chanson qui revenait sur les 19 pistes du disque : « habaytak bel saif, habaytak bil chité »... Il m’en avait expliqué les paroles : (je t’ai aimé en hiver je t’aimerais aussi tout l’été) et ça m’avait fait fondre. « J’ai ainsi appris avec lui à apprécier tous les styles que cette immense diva épousait avec bonheur. Une voix extraordinaire, apaisante et en même temps qui sait devenir passionnée et discrètement militante …Nous l’écoutions absolument tous les jours et je continue à le faire aujourd’hui. »
Fayrouz a été une magnifique introduction à la culture arabe. Lors de mon cursus de lettres modernes à l’université Sorbonne nouvelle j’avais pris un job étudiant à la librairie du monde arabe, ce qui m’a permis de me plonger à loisirs dans cette culture que j’adore.
« L’idée de ce livre retraçant la vie de Fayrouz s’était donc ainsi imposée progressivement à moi et j’ai entrepris une large recherche pour le présenter aujourd’hui.
En partant de l’enfance simple et modeste de Nouhad Haddad dans une famille unie et joyeuse de Beyrouth, ses vacances d’été chez sa grand-mère maternelle dans les montagnes du Chouf, son ascension progressive au firmament des arts et de la musique, ses tournées historiques de Damas au Caire à Paris, grâce à sa rencontre avec les frères Rahbani, sans jamais se départir de sa réserve ni de sa modestie. Sa présence au festival de Baalbeck a toujours été un moment unique. En me documentant sur son parcours, j’ai noté également la bienveillance des gens que j’ai questionné et leur admiration à son égard ».
Le plus étonnant dans cette histoire c’est que Marjorie Bertin n’a jamais visité le Liban ni aucun pays du levant. Cette région du monde est venue à elle à travers des amis d’université venus du Liban de Syrie ou d’Égypte qui se démarquaient totalement des autres par « leur chaleur et leur sens de l’accueil. Nous sommes amis jusqu’aujourd’hui et à chaque fois que nous nous retrouvons les chansons de Fayrouz nous accompagnent » !
Son métier de journaliste l’a fait également s’intéresser de très près à la région et à ses cultures et en observatrice éclairée elle a suivi, alors que le livre était sous presse, les bouleversements et les bombardements de Beyrouth et du Sud Liban, les douleurs et les exils.
« Dans un monde qui ne cesse de se déchirer, puissent la dignité, la retenue et l’amour du prochain portés par Fayrouz nous inspirer tous. Et le souffle de ses chants nous atteindre jusqu’à la fin des temps. Ce livre n’a pas d’autre ambition. »
Cette phrase résume à elle seule le récit de Marjorie Bertin, véritable chant choral qui offre ce petit supplément d’âme qui rend toujours un ouvrage inoubliable. Promis vous y reviendrez souvent !
« Fayrouz. Moi je chante l’humanité
Orient éditions
Une partie des recettes sera versée à l’association ”Les Petits Soleils” qui aide les enfants victimes de la guerre.
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