Benoît Debbané réinvente son style dans une exposition de portraits de femmes et natures mortes à la LT Gallery du 06 au 20 juin.
Architecte, illustrateur, peintre et graffeur dans les années 90, Benoît Debanné annonce clairement sa volonté d’expérimentation à travers cette exposition qui marque le début d’une déconstruction de style.
L’artiste est parti du genre classique de la pose et de la nature morte pour s’amuser à réinventer ces thèmes. Cette liberté il la prend tout d’abord en montrant des femmes sans complexe, telles quelles sont avec leurs formes voluptueuses, imparfaites. Les corps sont désarticulés, les perspectives intentionnellement secouées, les corps sont comme tordus pour entrer dans l’espace confiné de la toile.
Puis au niveau de la technique avec l’utilisation d’un crayon à huile, qui permet un trait franc mais également ne permet pas d’erreur. « Les oils sticks ce sont les crayolas pour adultes, pour les artistes qui ont gardé l’élan enfantin dans leur travail. ».
La genèse de l’exposition est basée sur le personnage de Tereza du roman de Milan Kundera ‘L’insoutenable légèreté de l’être’. Cette femme a fasciné l’artiste : « on rentre dans le personnage avec toutes ses incertitudes, ses angoisses, c’est une femme qui se trouve lourde car son mari la trompe, elle trouve qu’elle n’a pas de charme ».
L’artiste dessine Tereza telle qu’il la sent. Suivent ensuite d’autres femmes, connues ou inspirées comme Lolita de Vladimir Nabokov qu’il représente sous le nom de « Pipa » avec des écouteurs, allongée sur l’herbe et qui sirote un verre de vin.
« Il y a beaucoup de maladresses, ce n’est pas anatomiquement correct. ». Justement, c’est ce que l’artiste recherche en voulant se détacher du figuratif pour se rattacher à l’expressionisme abstrait avec un élan de fauvisme. Il admire le peintre Willem de Kooning avec sa série de peintures de femmes et aspire à être dans la même lignée des expressionnistes américains.
Une exposition dans laquelle l’artiste ose, avec l’utilisation du oil stick et également d’une couleur bleu outremer qui rappelle le bleu de Klein dans les toiles.
Ce sont des tranches de vie qu’on imagine derrière ces visages aux traits soutenus, aux poses franches dans des intérieurs ou des scènes qui suggèrent une histoire. C’est ce que l’artiste a souhaité ; suggérer des histoires, ouvrir l’imagination de l’observateur face à un corps qui se montre sans complexe, des visages qui le regardent.
La femme libanaise peut ainsi être devinée dans ces yeux, les traits des sourcils forts, la bouche, mais aussi la posture de certaines femmes comme le portrait de Tereza dans cette chaise de style ‘Bauhaus’ qui fait penser aux dos fatigués de nos Téta.
Et le chat orange dans tout cet univers féminin, ce chat, un des préférés de l’artiste, est peint dans sa terrasse.
Il n’y a pas de symbolisme à rechercher derrière cette présence. Mais selon lui, dans la culture populaire, les chats oranges sont difficiles à apprivoiser, imprévisibles.
Etant son animal préféré, le chat pourrait se rapprocher de l’artiste ; cette présence joueuse dans l’intimité des corps et visages de ces femmes qui trahissent des émotions sans fard, authentiques et décomplexées, le tout enrobé d’un trait qui va à l’essentiel.
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