Dalia Baassiri expose à la galerie Janine Rubeiz du 12 juin au 12 juillet des fragments d’éléments organiques et inorganiques collectés et assemblés en une symphonie tendre et intime.
Dalia Baassiri est une artiste confirmée. Née à Saïda, diplômée de graphic design à la LAU et de la Chelsea College of Arts de Londres, elle explique n’avoir jamais eu envie de vivre à l’étranger et quitter son pays. De multiples résidences l’accueillent, elle expose aussi bien localement qu’internationalement. Pourtant, comme elle le dit « j’aime mon pays, j’ai senti que l’identité des artistes est chez lui, son ADN, ses racines. La présence ici est très importante ».
L’amour de Dalia Baassiri pour le Liban et particulièrement sa nature est le fil directeur de “The Harvest”. Pour sa seconde exposition individuelle à la galerie Janine Rubeiz, l’artiste a travaillé ses œuvres durant une résidence de quatre mois en 2023 à Ashkal Alwan. Pourtant, au début, elle ne savait pas qu’elle donnerait naissance à ces toiles intimes et profondes. Elle avait juste envie de se remettre à la peinture, qu’elle avait arrêté durant de nombreuses années pour d’autres médias.
Elle avait collecté divers débris, principalement des fragments de murs de l’immeuble Fayyad en face du port de Beyrouth, des branches d’arbres grossièrement coupées pour faire du charbon pour les fumeurs de narguilé ainsi que les restes de cire des bougies de prières à Harissa.
Elle ne se questionne pas, elle ne fait que collecter. Pendant deux ans, ces formes de « vulnérabilité » étaient dans des boites jusqu’à ce que l’artiste les délivre dans son studio et « écoute leur histoire après ce long silence ». Cette moisson donne ses fruits.
La récolte ou ‘Harvest’ est assemblée, désassemblée, elle devient une entité, une mosaïque sur le canvas. L’artiste est touchée par la vulnérabilité de ces matières, elle leur donne alors une nouvelle vie en sublimant leur délicatesse et les solidifie. Travailler la matière organique s’avère délicat, elle n’hésite pas à demander conseil à Gaby Maamari afin de préserver les substances.
L’artiste travaille par élan intuitif, en laissant le temps à la création de s’exprimer sans jamais forcer un résultat. Ce processus organique se retrouve parfaitement dans les œuvres exposées, avec la tendresse que l’on sent du collectionneur qui ramasse depuis des années ces éléments « rebus » pour leur laisser la parole une fois qu’ils se sentent prêts.
« Je ne m’explique pas ce que je fais, ‘the Harvest’, c’est un acte de collectionneur qui s’inscrit dans le temps des saisons ». Les œuvres ont été travaillées en parallèle avec les différentes pièces dont les bougies d’Harissa « un lieu que j’adore, beaucoup de personnes y vont sans regard de leurs confessions, elles veulent respirer, s’exprimer… les gens qui prient se purifient avec ces bougies ».
Ce sont ces prières qui poursuivent leurs chemins sur la toile de l’artiste, en une mosaïque qu’elles épousent avec les divers éléments collectés.
Pour elle, l’exposition se rapproche des prières qu’ont fait parce qu’il y a un manque. « Ce qui est important est comment on traite le manque, soit tu te rends victime, soit tu prends en charge les choses pour avancer. »
L’art est pour elle une manière d’avancer, ainsi en est-il avec les branches d’arbres qu’elle monte en sculpture pour rendre hommage à la Nature car « ils ont été touchés par leur environnement. Je leur donne de l’amour, je les respecte. »
« Est-ce que vivre dans un pays aussi instable que le Liban nous rend particulièrement familiers et attirés par les lambeaux et ruptures ? » se questionne l’artiste.
L’exposition fait de ces blessures un témoignage de recomposition délicate telle la résilience des Libanais dans un pays construit et protégé de milliards de prières capturées dans de la cire de bougie.
Pour la suite, l’artiste sera à Dubaï mi-juillet où elle exposera à la galerie Isabelle, exposition organisée par Jad Karam.
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