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Musique de chez nous, mémoire de nos émois - 9

20/01/2025|Jocelyne Dagher Hayek

''La Musique donne une âme à nos cœurs et des ailes à la pensée''. Platon


Pour apprécier et saisir la portée de cet article, il est fortement recommandé d'ouvrir les liens proposés.

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Zaki Nassif

La première chose qui frappait lorsque l’on rencontrait Zaki Nassif, c’était son regard tendrement malicieux et son sourire avenant. Le personnage, artiste dans l’âme, avait une sensibilité, une générosité et une empathie remarquables. Franc, exigeant quand il s’agissait de musique, ses compositions lui ressemblent. Elles portent en elles une belle humanité.



Né le 4 juillet 1916 à Machghara, dans la Békaa, et mort le 11 mars 2004 à Beyrouth, Zaki Nassif peut être considéré comme le fondateur d’une nouvelle école de musique, libano-arabe, unique en son genre, associant paroles, musique, orchestration et danse. Walid Gholmieh, directeur du Conservatoire Libanais Supérieur de Musique, Compositeur et Chef d’orchestre dira de lui : Il est le fondateur de l’école libanaise de musique.

Ce personnage attachant a profondément marqué la scène musicale libanaise laissant à sa mort, en mars 2004, une œuvre riche et variée comprenant plus de 1100 chansons et morceaux de musique appartenant à différents styles et genres musicaux.



Benjamin d’une fratrie composée de 2 filles et 3 garçons, Zaki Chaker Nassif connaît une enfance heureuse à Machghara bercé par la belle voix de sa mère qui lui chante des mélodies orientales et par les chansons des grands interprètes du moment dont le père passait les disques à la maison, Sayed Darwich, Youssef el Menlawi, Oum Koulthoum. Le jeune garçon est aussi extrêmement sensible aux versets du Coran psalmodiés par le grand cheikh égyptien Salam Hijazy ainsi qu’à la liturgie grecque orthodoxe qui l’imprègne lors des offices à l’église. Il est aussi très tôt initié à la dabké couramment pratiquée dans la Békaa. Cette exposition précoce à la dabké traditionnelle développera chez lui la conviction que ces danses folkloriques libanaises pouvaient être une véritable expression des célébrations collectives de joie et de solidarité.

En 1920, la famille de Zaki Nassif quitte Machghara pour s’installer à Beyrouth.

Zaki commence à apprendre, en autodidacte, le Oud, Mejwez et d’autres instruments traditionnels. Par amour pour le chant liturgique, il rejoint le chœur de l’église de la paroisse de Ain el Remmaneh.

La situation financière de la famille se complique et, en 1925, le père de Zaki fait face à une première faillite. En 1933, Zaki est atteint d’une poliomyélite qui le laissera boiteux pour le reste de sa vie. Il abandonne ses études au Lycée Français, études qu’il reprendra plus tard à l’école du Saint Sauveur.

Sur l’insistance de son frère aîné, conscient de la passion de Zaki pour la musique, Zaki s’inscrit à l’Institut de Musique de l’Université Américaine de Beyrouth. Il y rencontre Toufic el Bacha. Leurs amitié et collaboration musicale date de cette période. Comme bon nombre d’étudiants de l’AUB, le jeune homme sera affecté par les idées sociales et politiques du moment. Ces idées ont fortement influencé ses convictions sociales et patriotiques tout au long de sa vie donnant forme à son style musical caractérisé par un réel intérêt pour la musique folklorique, la poésie et la dance ainsi qu’une connaissance encyclopédique des traditions musicales syriaque et byzantine.



A cause de la 2eme guerre mondiale, ses études à l’AUB connaitront des périodes d’interruption. Il les poursuivra néanmoins jusqu’en 1941 puis rejoindra les cours de Bertrand Robillard, mentor de la plupart des compositeurs libanais, à l’Académie Libanaise des Beaux-Arts. Ce dernier lui enseigne le contrepoint et la fugue.

Un second revers de fortune de sa famille, en 1949, pousse Zaki à abandonner l’entreprise commerciale de ses parents et à se consacrer totalement à la musique.

En 1953, Zaki Nassif est présenté par les frères Rahbani au directeur de Radio Orient (qui deviendra plus tard Radio Liban). Il y est engagé en tant que compositeur.

On notera qu’à cette période, les chansons dans les pays arabes, étaient essentiellement en langue égyptienne et bédouine. Le mérite de l’ouverture au folklore local revient à Radio Orient et son directeur artistique Sabri Charif qui a su s’entourer d’une pléiade de nouveaux compositeurs libanais imprégnés du patrimoine local comme Zaki Nassif, Toufic el Bacha, Philémon Wehbé et les frères Rahbani.

Ce sera le début de ce que l’on peut considérer comme l’âge d’or de la production musicale libanaise en général et de la dance folklorique en particulier. « Une Renaissance Libanaise » que le quintet formé de Zaki Nassif, Assi et Mansour Rahbani, Toufic el Bacha et Abd el Ghani Chaaban incarnera. Le but de ces musiciens, aussi brillants que créatifs, sera de promouvoir un modernisme musical qui ne perdrait pas de vue l’identité musicale locale.

Zaki Nassif, encouragé par Sabri Charif va introduire un style nouveau de chant sur les ondes radio, le chorus (reprise à l’unisson d’un chant ou d’un refrain). Jusque-là, le chanteur n’était pas accompagné.



En 1957, le groupe des cinq (libanais) inaugure « Les nuits libanaises » du festival de Baalbeck . Des chansons comme « Tallou Hbabna Tallou » et Ya lala aayni ya lala » feront partie du répertoire chanté en chœur des premières « Nuits Libanaises de Baalbeck. Cette collaboration artistique jouera également un rôle signifiant dans le développement de la Dabké.



La musique de Zaki Nassif donne au folklore libanais une vigueur nouvelle. Sa carrière de compositeur et de chef d’orchestre est définitivement lancée.

A partir de 1965, Zaki Nassif travaille en solo et réalise 2 participations majeures au Festival de Baalbeck en 1970 et 1974 tout en composant, en parallèle, pour des chœurs et des chanteurs célèbres comme Sabah, Nasri Chamseddine, Wadih el Safi, Joseph Azar, Samira Toufic.



Zaki Nassif élargit et diversifie son champ d’action pour le plus grand bonheur de tous les amateurs de musique. Il donne des cours au Conservatoire National de Musique et au Collège des Apôtres à Jounieh dispensant avec générosité son savoir. Il fait partie du jury de l’émission télévisée Studio el Fan qui a permis de découvrir de nombreux talents. Il compose le générique des feuilletons à succés Barbar Agha et Akhwat Chanay, collabore pendant plus d’une décénnie avec la troupe de danse Caracalla mondialement réputée.


Au plus fort de la guerre, en 1980, sa chanson Rajee Yetaamar Lebnan, devient l’hymne de tout un peuple et catalyse les espoirs et la volonté de toute une génération. Il est en passe de détrôner l’hymne national libanais et lui vaut une reconnaissance nationale et des royalties de la chaîne de télévision LBC qui lui permettront de vivre décemment jusqu’à son décès en 2004.



Zaki Nassif n’en perd pas pour autant son humilité et sa bonhommie. Le Liban, il l’a aimé passionnément. Il sera le chantre du terroir rural libanais et levantin. Ses chansons font partie du répertoire incontournable de la chanson populaire libanaise.

En 1981, il compose pour Fairuz, Sur un texte de Gibran Khalil Gebran, « Ya Banni Oummi ». Puis, en 1996, les paroles et la musique de Mahma yetjarah baladna.

Zaki a interprété personnellement plusieurs de ses chansons. Il a aussi travaillé avec la nouvelle génération d’interprètes libanais comme Magida el Roumi, Ghassan Saliba.

Zaki Nassif décède le 11 mars 2004, laissant à la postérité un fabuleux héritage musical riche et diversifié combinant musique, paroles, danse et orchestration.

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